Conscience corporelle et douleur

Les patients lombalgiques peuvent souvent témoigner d’une perception de bassin décalé ou d’asymétrie pelvienne.  La thérapie manuelle a donc porté une attention particulière à la position des articulations de la ceinture pelvienne dans l’approche des lombalgies et douleurs pelviennes. La recherche s’est aussi beaucoup portée sur les douleurs des articulations lombo-pelviennes, sur la méthode diagnostique , ainsi que sur le bien fondé de la correction biomécanique de celles-ci dans l’approche des douleurs lombaires et pelviennes.
 

 Quelques études éclairantes 

 

    Toutes les études (Seffinger et al 2004; Stockendahl et al 2006; Triano et al 2013 ) s’interressant à la reproductibilité des tests palpatoires utilisés en thérapie manuelle, incluant les tests positionnels de l’articulation sacro-iliaque, montrent que ces tests ne sont pas fiables (inter et intra-examinateur). C’est à dire que non seulement deux praticiens n’auront pas le même diagnostic positionel sur un même patient, mais aussi, en aveugle, un praticien n’aura pas le même diagnostic poitionnel sur le même patient.

    Concernant le mode d’évaluation de l’articulation sacro-iliaque (ASI) par les ostéopathes, Rajendran et Gallagher 2011 ont fait une étude clinique sur l’évaluation des points de repères du bassin en utilisant la palpation selon le modèle biomécanique de Mitchell, pour évaluer l’ASI (20 praticiens testent 2 sujets avec la position des répères osseux). 

 

    Ils concluent qu’aucune des procédures palpatoires effectuées ne sont fiables (Fleiss kappa<0.4). D’autre part concernant les corrections positionnelles de l’articulation sacro-iliaque, l’étude de Tullberg et al 1998 (cité par D.Beales) montre qu’il n’y a pas différence de position de l’articulation sacroiliaque entre avant et après la manipulation : on ne change donc pas la position d’une articulation avec une manipulation.

 

 

Asymétrie pelvienne et douleur pelvienne ou lombaire

 

   E. Lederman présente plusieurs études effectuées chez des patients asymptomatiques, qui montrent qu’il n’y a pas d’association entre les états lombalgiques et: l’asymétrie/obliquité pelvienne; 
l’angle latéral du promontoire sacré;
 ou encore l’inégalité de hauteur des crêtes iliaques.

 

 Devant tous ces éléments, qui mettent en avant :

Le manque de fiabilité diagnostic des tests palpatoires positionnels ;

La non-spécificité nociceptive de cette articulation ;

Le blocage articulaire de cette articulation n’existe pas.

L’asymétrie de cette articulation n’est pas impliquée dans les douleur lombaires ni pelvienne.

 

     Il semblerait prudent d’arrêter les propos alarmistes de bassin « décalé, bloqué ou asymétrique ». Il n’existe aucune preuve que la « mauvaise posture » puisse provoquer ces douleurs. A l’inverse, il y a beaucoup de preuves qui montrent que tenir de tels propos, laisse croire aux patients que leur corps est fragile et augmente leur douleur.

      Plusieurs études montrent non seulement que ces croyances négatives créent de la peur du mouvement, des attitudes de dépendance de traitements passifs, et surtout elles ont tendance à faire passer ces douleurs à la chronicité (Kendall et al 1998, Lee et al 2015, Werti et al 2014, Ramond- Roquin et al. 2015).

   Pourtant les patients lombalgiques témoignent bien d’une sensation d’assymétrie de leur bassin. C’est à cette perception modifiée ressentie par les patients qu’essaye de répondre D. Beales à travers un article qu’il a écrit cette année, et d’autres références que nous exposons ci-dessous.

 

 

Conscience corporelle et douleur

Neuroplasticité et le « floutage cortical »

 

    Le cerveau cartographie le corps humain (somatotopie ou homonculus). Depuis une quizaine d’années, cette cartographie s’évalue par des outils comme l’IRM fonctionnel ou la Stimulation Magnétique Transcrânienne.
Ces outils nous ont permis de mesurer la taille et l’activité des cartes corticales et on s’est rendu compte que celles-ci étaient vivantes, modifiables et plastiques (Pascual Leone et al 2005).

    C’est ainsi que l’on a mis en évidence la neuroplasticité du cerveau. Elle se définit par la capacité de changement morphologique ou fonctionnelle dans les propriétés neuronales (Calford 2002 ; Sanes 2000).
On a découvert aussi que la douleur modifiait ces cartes, non seulement par l’imagerie (Flor 1998) mais aussi cliniquement (altération de la perception et/ou du contrôle moteur).

    Dans cette optique Wand et al 2014 ont dévellopé un questionnaire, le FreBAQ, qui semble être un moyen psychométrique pour l’évaluation de l’altération de l’auto-perception du dos chez les personnes souffrant de lombalgie chronique. Ils ont démontré que le niveau d’altération de l’auto-perception est positivement corrélée avec l’intensité de la douleur et de l’invalidité (Wand et al 2016). Ils ont aussi montré qu’il existe une corrélation entre le niveau d’altération de perception et : la détresse psychologique, la catastrophisation de la douleur, les comportements d’évitement-d’appréhension et le seuil de la douleur à la pression des épineuses lombaires.

    Ceci étant, et malgré la nécessité de recherche supplémentaire, D. Beales conclue à juste titre qu’il y a assez de preuves et d’indications pour que les cliniciens considèrent l’altération de perception comme un facteur contribuant à la douleur invalidante lombo-pelvienne chronique.

 

 

Synthèse de l’article de Laurent Fabre

http://blog.cfpco.fr/index.php/category/gestion-de-la-douleur

 

 

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